Régulièrement, on voit certains de nos concitoyens laver leur véhicule dans la rivière (parceque c’est pratique et/ou parce qu’ils peuvent économiser de l'eau et de l'argent) sans forcément se soucier des conséquences écologiques et du droit. Derrière cette question anodine découlent d’autres questions intéressantes : à qui appartient l’eau de la rivière ? Puis-je la puiser ? Si oui, y a-t-il une limite en quantité ? Pour quelle destination ? Si non, quelles sont les sanctions ? Afin de vous donner des informations les plus exactes possible, j’ai contacté l’Association des Maires de la Haute-Marne (dont notre commune est adhérente) qui, par l’intermédiaire de l’une de ses juristes, Audrey GALLON, m’a donné très gentiment une réponse détaillée. En voici la synthèse.
Tout d’abord, il faut savoir qu’il n’existe pas de texte de loi réglementant le lavage des voitures dans l’eau d’une rivière. Donc, c’est permis. En revanche, cela ne signifie pas qu’on a le droit de faire tout et n’importe quoi. La conséquence de nos actions peut entraîner effectivement des sanctions édictées par des textes de loi en vigueur.
Laver sa voiture à la rivière va forcément dégrader la qualité de l’eau et donc entraîner de graves conséquences pour la faune et la flore de l’Aujon. En effet, les huiles et autres saletés qui recouvrent les voitures (surtout au niveau du bas de caisse) sont hautement polluantes. On peut facilement comprendre que laver sa voiture, et plus particulièrement les parties telles que moteur, châssis ou passages de roues, rejette dans le sol des résidus d'huiles et d'hydrocarbures qui participent :
Rien que cela ! Et s’il y a constat depollution avérée, vous encourez une amende pouvant aller jusqu’à 76 000 euros et 2 ans d’emprisonnement !
D’autre part, il faut savoir qu’il existe dans la réglementation française deux types de cours d’eau : le cours d’eau domanial et le cours d’eau privé, chacun suivant des principes différents. Renseignement pris auprès du « Service Rivières du bassin de la Marne et de ses affluents » du Conseil Général de la Haute-Marne, il s’avère que l’Aujon est un cours d’eau de type privé, de sa source à sa jonction avec l’Aube. Cela signifie que les droits des usagers sont restreints dans la mesure où le passage sur les berges et l'exercice du droit de pêche sont liés à une autorisation préalable du riverain. Malgré tout, les usagers peuvent exercés librement les activités de baignade, de promenade en barque, d’abreuvement du bétail et de puisage de l’eau. A condition toutefois de ne pas transgresser la propriété privée, par exemple dans le cas d’une promenade en barque, en abordant sur la rive qui, elle, est bien privée.
En clair, rien ne vous interdit de laver votre voiture avec l’eau de la rivière si vous avez l’autorisation du propriétaire pour stationner votre véhicule sur la berge. D’autant plus que pour l’Aujon, cours d’eau privé je le rappelle, l’eau est chose commune, donc gratuite (généralement, ce qui est facturé pour l’eau, c’est sa distribution). Sur la Place du village, le propriétaire est la Commune. C’est donc au Maire que revient le choix de donner son autorisation ou pas. Sa décision finale dépendra également du fait qu’il doit veiller à la bonne salubrité des mares, ruisseaux, rivières et étangs de sa commune. A noter également pour information que le Préfet a aussi le pouvoir de restreindre l’utilisation de l’eau de la rivière (en cas de sécheresse par exemple).
Pour finir, retenons une chose importante : au même titre que le riverain doit restituer l’eau à la sortie de sa propriété dans son état d’origine, l’usager doit restituer l’eau comme il l’a trouvée. Autant dire que quand on lave sa voiture sur la Place, c’est impossible !
La conclusion est donc toute simple : par principe, laver sa voiture dans la rivière est possible, mais au vue des risques que cela peut engendrer pour la qualité de l’eau de la rivière et des sanctions menaçant l’usager, cela est à proscrire. Personnellement, je pense que cela mériterait d’être abordé en conseil municipal afin de déboucher sur un arrêté interdisant clairement cette pratique.
Christophe FEVRE