Nous sommes habitués depuis quelques années maintenant à voir des visages étrangers et à entendre parler l’anglais lors des cérémonies de commémoration du décès des 7 aviateurs survenus dans la nuit du 12 au 13 Juillet 1944. Il s’agit de la famille SHAW dont faisait partie le sergent Frank Everett SHAW, mort au combat pour notre liberté. Leurs visages nous sont devenus familiers et nous apprécions leur gentillesse. J’imagine que c’est réciproque. Notre accueil est la moindre des choses vis-à-vis d’une famille qui a sacrifié l’un des leurs. A la veille du 65ème anniversaire, j’ai voulu en savoir plus sur leur sentiment par rapport à cet évènement, connaître la vision que les anglais en ont de l’autre côté de la Manche. Voici mon interview.
Le Petit Charbonnier : Quel est votre lien de parenté avec le sergent Franck Everett SHAW ?
Sandra FINCHAM et Patricia SHAW : Le sgt SHAW était notre oncle et le plus jeune frère de nos pères respectifs (Sandra et Patricia sont donc cousines – ndlr).
Le Petit Charbonnier : Savez-vous pourquoi votre oncle s’est engagé dans cette guerre ?
Sandra et Pat : Il s’est engagé dans la Royal Air Force (RAF) afin de se battre pour la liberté.
Le Petit Charbonnier : Que savez-vous de l’accident du Lancaster au dessus de Cour-l’Evêque ?
Sandra et Pat : Leur avion a décollé de la base militaire de Barnham dans le comté du Lincolnshire (à plus de 600 Kms à vol d’oiseau de notre village – ndlr). Leur mission consistait à bombarder les lignes ferroviaires qui acheminaient les munitions d’Allemagne.
Le Petit Charbonnier : Parliez-vous facilement de cet évènement dramatique au sein de votre famille ?
Sandra et Pat : Notre Grand-mère, Granny SHAW (la mère du sergent SHAW – ndlr) avait toujours sur son buffet la photo de notre oncle. La sœur du sergent SHAW, Joan, et son frère, Fred, ont pour leur part une grande photo encadrée de lui chez eux sur le mur.
Le Petit Charbonnier : Que vous en disaient vos parents ?
Sandra et Pat : Nos parents nous ont souvent parlé de la première visite de notre grand-mère, Granny SHAW, sur la tombe de notre oncle à Cour-l’Evêque. Elle est venue accompagnée de la mère d’un autre aviateur, le sgt GRIEVE, quand les corps ont été enterrés au cimetière. Elle est également venue quand les tombes ont été réalisées. Cela devait être en 1946 ou 1947. Nous avons des photos de cette époque.
Le Petit Charbonnier : Est-ce que votre famille a récupéré des affaires personnelles de votre oncle ?
Sandra : Oui, Mon fils Dean, qui est donc le petit neveu du sergent SHAW, possède des reproductions des médailles de mon oncle ainsi que des plans de vol de l’époque. Nous avons également beaucoup d’autres photos.
Le Petit Charbonnier : Aujourd’hui, comprenez-vous le sacrifice de votre oncle pour la liberté de notre pays ?
Sandra et Pat : Oui, bien-sûr. Il a payé le prix ultime en donnant sa vie avec les autres membres de l’équipage.
Le Petit Charbonnier : Depuis quelques années, vous avez décidé de venir à Cour-l’Evêque célébrer l’hommage rendu à ces 7 aviateurs. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?
Sandra : Lors du 50ème anniversaire, en 1994, mon mari et moi sommes venus à Arc-en-Barrois au mois de Novembre pour visiter les tombes des aviateurs. La gérante d’un des commerces, qui parlait anglais, nous amena à Cour-l’Evêque. Elle nous présenta un monsieur qui nous conduisit jusqu’à la stèle, au milieu de la forêt. Ensuite, nous rencontrâmes une jeune fille qui nous mena aux tombes dont elle s’occupait elle-même. Avant elle, l’entretien des tombes avait été fait par sa grand-mère puis sa mère. Sa grand-mère est d’ailleurs sur les photos de notre grand-mère de 1946 et 1947 dont je parlais tout à l’heure. Je ne connais pas son nom de famille. Mais je sais juste que la tombe de ses grand-parents se trouve à proximité des tombes des aviateurs. De retour chez moi, je reçu une lettre de Monsieur Jean-Paul GUILLAUME me parlant de Cour-l’Evêque et des aviateurs. Ensuite Patricia, son compagnon Tony, mon mari Barry, mon fils Dean et moi avons décidé de revenir à Cour-l’Evêque pour le 60ème anniversaire, en 2004. Et nous venons chaque année depuis. J’avais écrit à Jean-Paul GUILLAUME pour lui annoncer notre venue pour le 60ème anniversaire, mais Dominique GUILLAUME, son fils, nous informa que son père était décédé. En venant en 2004, nous avons fait la connaissance de Madame GURY qui depuis joue le rôle d’interprète pour nous. En 2005, notre petit-fils nous accompagna aussi. Et en 2006, nous sommes venus avec le mari de Pat et leurs enfants. L’année dernière, nous étions 10 en tout – un ami de mon fils Dean nous accompagnait car son grand-père est enterré en France.
Le Petit Charbonnier : Je sais que vous serez là aussi cette année pour le 65ème anniversaire. Quels sont les membres de votre famille qui vous accompagneront ?
Sandra : Il y aura Pat, ma cousine, Tony, son compagnon, Barry, mon mari, moi-même bien sûr, notre fille Nicola, mon fils Dean et son ami Rob. Il y aura moins de monde que prévu à cause des examens scolaires à passer pour certains et des obligations professionnelles pour d’autres. Parexemple, la fille de Pat ne sera pas là.
Le Petit Charbonnier : En France, nous savons l’importance que revêt la mort de tous ces soldats étrangers venus mourir sur notre sol pour notre liberté – nous entretenons ce souvenir dans l’esprit des jeunes générations. Le souvenir est-il aussi vif de votre côté de la Manche ?
Sandra et Pat : Les programmes scolaires relatent la première et la seconde guerres mondiales. Les écoles organisent des visites en France juste pour voir les champs de bataille et faire connaissance avec la France. Nos filles ont participé à ces voyages. Mon fils Dean et son ami sont venus tout dernièrement en Normandie, le 6 Juin 2009, pour célébrer le 65èmeanniversaire du débarquement, le « D Day ».
Si vous avez vous–même des questions à poser aux membres de la famille SHAW, n’hésitez pas. Ils se feront un plaisir de vous répondre et de communiquer avec vous (Madame GURY, moi-même et d’autres pourrons vous servir d’interprète).
Je remercie chaleureusement Sandra et Patricia pour le temps qu’elles ont consacré à mon questionnaire et à mes courriels.
Christophe FEVRE